i had all and then most of you, some and now none of you. (arthur)

La routine a reprit son cours. Elle est vivace, brutale. Arthur pensait pas qu'il serait aussi difficile de se remettre sur les rails. De subir les nuits, presque lassantes que le Red Lion traine dans son sillage. Il aimait ce lieu, il aimait les âmes qui s'en échouaient. Aujourd'hui, ça n'a plus le même goût. Amertume dans le fond de sa gorge, il renie les vérités, demande de l'oxygène qu'il n'a pas. Iris qui se pointe, Iris qui l'achève de ses prunelles brunes. Le deuil n'est pas fait, le deuil le perce le palpitant. Et à chaque pas qu'il fait, y a les images d'un passé qu'il préférerait oublier. Prit entre deux feux, ces derniers temps, il aimerait juste s'en aller. Vivre l'aventure qu'il a longtemps gardé secret. Hill Head, devenue trop étouffante. Ses ambitions qu'il porte de ses épaules frêles, qu'il n'arrive plus assumer. Anja qui le fuit, Anja a qui il ne cesse de penser. Le Red Lion n'a plus le même goût sans la brune à ses côtés et pourtant, c'est bien lui qui a décidé d'imposer la distance. Pour leur bien. Pour son bien à elle finalement.

Sa carcasse qu'il traine dans l'appartement. Chris n'est pas dans les parages et malgré le manque d'un frangin omniprésent, ça lui fait du bien cette solitude. Il est pas prêt à croiser son regard, pas prêt à lui avouer des vérités dont il ne connait même pas les mots. Que dire ? Que faire ? Ça l'assume. Ça le tue à petit feu de se dire qu'il a trahi son propre sang. Pourtant persuadé, un temps, que ça le toucherai pas plus que ça, aujourd'hui, tout est bien différent. Il est amer Arthur, dans les ténèbres d'un subconscient qu'il noie sous le fléau de l'alcool. Encore. Il s'échoue sur le canapé usé, allume la télé et zappe. Rien. Nada. Il comprend pas. Regarde même pas. Et y a le sommeil qui le gagne à petit feu, ses yeux qui se ferment au rythme de son palpitant qui se taie. Lentement. Les bras de Morphée qui l'entourent de ses caresses, sur le moment, c'est apaisant. Jusqu'à ce que les cauchemars ne l'assaillent. Brutales. Y a le sang qui perle son visage, le goût du sable qui lui vient sur la langue et la chaleur du soleil qui lui tape la peau. Un visage sombre, un visage qu'il arrive pas à dépeindre et le ventre rond d'une mère échouée sur les terres africaines. Il se réveille en sursaut, suffoque à plein poumons. Peut être une heure, voir deux minutes seulement à dormir. Arthur se frotte le crâne, penche en avant et réalise seulement maintenant, qu'il était encore partit dans ses cauchemars incessants. Ceux dont il peut pas se défaire. Y a son portable qui finit par le sortir de sa torpeur, la sonnerie qui retentit dans le fond du canapé usé. Il s'en saisit, de ses mains tremblantes, lit le sms. Arthur fronce les sourcils, s'attendait pas à avoir de ces nouvelles. Des jours qu'ils se fuient pour pas se contempler, pour pas voir la vérité en face des draps consumés. Anja demande à le voir et bien loin de s'inquiéter de ce qui pourrait se tramer, il répond par des questions, veut pas vraiment pointer sa moelle dans son appartement. Il ne sait que trop comment ça fini. A chaque fois. N'a pas envie de se perdre encore une fois, dans ses bras. Il succombera, c'est écrit, c'est dans son épiderme que ça se finit. Seulement, t'es pas enculé. Elle semble délaisser et t'as le coeur qui peut pas renier.

Le jogging enfilé, le sweet à capuche aussi, il se presse vers la sortie, sait qu'il n'a que quelques mètres à parcourir pour rejoindre la brune paniquée. Parce qu'elle semble l'être. Derrière un écran de téléphone, il arrive à le sentir et c'est sans prévenir, qu'il entre dans son appartement, constate avec questionnement, le bordel qui traine. Y a les tiroirs arrachés laissés à l'abandon sur le sol de son appartement, les affaires balancés sans état d'âme. Il comprend pas sur le moment, se pose mille et une questions. Anja ? Il demande, la cherche du regard dans la petite pièce qu'est son salon. Les objets fracassés sur le sol qu'il enjambe et au loin, l'eau qu'il entend couler dans la salle de bain. Y a l'inquiétude qui commence à bercer son échine, qui tiraille ses entrailles d'alcoolique. Arrivé au pas de la porte, y a la brume de l'eau chaude qui lui bouche la vision et pourtant, il croit bien voir le corps de la brune échouée dans le fond de la baignoire qui se remplit. Anja, ça va pas ? Sa voix sonne comme un murmure, ses sourcils se froncent et derrière le son de l'eau qui s'échoue sur la céramique, il entend les sanglots. Ses sanglots. Son palpitant qui chavire tout à coup. Parce qu'il l'a jamais vu pleurer, parce qu'il est pas prêt pour ça non plus. Il s'avance, avec précaution, ne sait pas pourquoi il est autant stressé. Y a comme un goût merdique qui consomme l'air, un goût de tragique. Son échine qui se tend et deux pas plus tard, il constate le corps recroquevillé de sa meilleure amie qui baigne dans l'eau bouillante qu'elle fait couler. Le regard inquiet, il ose à peine s'approcher, finit tout de même pas s'agenouiller près d'elle. Les bras ballants, y a l'envie de la prendre dans ses bras, mais aussi le traca qui l'empêche de le faire. Qu'est-ce qu'il y a ? Elle pleure pas Anja. Elle est dure, elle est loyale. Elle est belle aussi. Et t'sais que y a un truc dramatique qui vient de se passer, t'sais plus où te situer.