Surprise feat Gabriel

Je reviens du journal enfin de ce qu’il en reste. Il a été incendié il y a deux mois et les travaux n’ont toujours pas commencé. J’ai sans arrêt les assurances au téléphone et ça prend plus de temps que prévu. Tous les jours je vais là-bas pour m’assurer que ce qui reste ne crame pas ou ne s’effondre pas. J’avais rendez-vous avec un chef de travaux cet après-midi et tant qu’il n’a pas l’accord des assurances il ne peut rien faire. J’ai pesté et j’ai appelé de nouveau les assurances. J’ai passé mon après midi au téléphone et je suis revenu à la maison pour essayer de finir un article. April est à la danse et Gab doit être quelque part dans la maison. J’ai pris une douche et je me suis installé dans mon bureau à l’étage. Je n’arrive pas à me concentrer. Je pense à trop de choses, l’incendie, ma femme, ma fille, l’affaire en cours, l’incendie, ma fille, le copain de ma fille qui squatte à la maison. J’ai la tête qui va sauter. Je me masse les tempes et j’enlève mes lunettes que je pose sur le bureau. Je me demande pourquoi je me bars pour autant de causes si c’est pour qu’on me brûle mon journal. J’ai mis une bonne partie de mes économies dans cette entreprise et je ne pensais pas qu’on en arriverait là, mais je trouverais les responsables. Je vais mener mon enquête comme je l’ai fait pour l’accident de Dalila. Je me lève et vais dans le mini bar de mon bureau pour en sortir une bouteille de vin. Je me sers un verre. Je me lève et me dit que Gab à peut-être envie d’un verre lui aussi. Sa chambre est à côté. Il doit y être j’ai entendu la porte tout à l’heure. Je me lève et sort du bureau pour aller dans sa chambre et commence à boire une gorgée de mon verre en même temps que j’entre dans sa chambre. Je recrache le vin quand je comprends qu’il était occupé, les bruits plutôt distincts sur son ordinateur ne peuvent pas me tromper.

« Oh putain. »

Je me retourne et referme reviens sur mes pas, lui laissant le temps de reprendre une contenance et me laissant le temps aussi de chasser les images de ma tête. Je me fiche pas mal qu’il matte du porno, je le fais aussi, mais je ne pensais pas le voir en jour réellement entrain de … Je fini par me retourner avant de lui dire :

« Tu ne fais pas ça quand April est là hein ? Je toquerais la prochaine fois. »

Oui toquer serait une excellente option, pourquoi je n’y ai pas pensé plutôt ? April me reproche toujours de ne pas frapper avant d’entrer dans sa chambre. Je ne l’ai jamais surprise avec son copain et j’espère que ça n’arrivera jamais.

« En fait j’étais venu te proposer du vin … mais j’imagine que tu es occupé … »

J’ai un mini sourire sur le coin des lèvres, finalement ça me fait plutôt rire de le surprendre, ce n’est jamais arrivé qu’il me surprenne quand j’avais seize ou dix-ans, à Edward non plus d’ailleurs, même si je sais très bien qu’il avait des magazines planqués sous son lit. On l’a tous fait au final.

Il y avait du soleil pour une fois, ton regard tourné vers la fenêtre tu te mets à grogner avant de te retourner dans le lit. Tu n'étais pas sortit aujourd'hui. Tu avais passé ton temps à regarder par la fenêtre, comme tu le faisais à Londres, comme tu le fais régulièrement, voir beaucoup trop souvent depuis ton réveil. Te retournant encore une fois, tu soupires à nouveau. Tu ne savais pas quoi faire aujourd'hui, tu t'ennuyais ferme. Surtout que tu n’avais pas eut l'intention d'aller au refuge, ce qui limitait encore plus tes activités de la journée. Allongé à regarder le plafond, tu commences à laisser tes pensées dériver. Sur un coup de tête, tu tires l'ordinateur à toi, quelques clics et tu ouvres une page enregistrée au fin fond de ton historique internet. Tu ne l'utilisais pas souvent avant, mais depuis ton retour à Hill Head tu l'as déjà ouverte plus d'une fois cette page. Un pâle sourire sur les lèvres quand tu vois la femme nue s'afficher à l'écran. Oui, tu allais mater un porno. Oui, tu n'avais que ce moyen pour te soulager ici. Après tout, tu n'étais pas à Londres où tu pouvais te trouver des filles différentes plusieurs fois par semaines si tu le souhaitais sans prendre le risque de les recroiser le lendemain en allant acheter ton pain. Tu n'étais pas fou. Surtout pas dans cette ville où tout se sait et où tout se dit.
Sans réfléchir plus encore, tu t'installe plus confortablement contre les coussins, virant ton tee-shirt et descendant ton bas de jogging juste assez pour qu'il ne te gêne pas quand tu seras entrain de te branler. Lançant une vidéo que tu n'as pas vu, tu n'as pas peur que quelqu'un t'entende, tu es tout seul à la maison aujourd'hui. April est partie tu ne sais où avec son squatteur de copain, et Will est en rendez-vous pour le journal. Au moins tu ne serais pas déranger. Et puis... Tu avais aussi quelque chose à vérifier.
Tu fais fi des cris plus que surjoués et simulés de la femme siliconé à l'écran, te concentrant sur les sensations et imaginant que c'est toi à la place de cet homme qui bouffe des compléments hormonaux à chaque repas. Tu cherches ton propre plaisir à travers ces images, fermant par moment les yeux pour essayer d'y voir une image de femme.

Mais rien ne semble vouloir y faire, le plaisir n'est pas là. Pourtant tu sais que tu fais exactement comme il faut s'y prendre, tu sais quels gestes tu aimes, tu essaies d'imaginer au mieux les sensations. Et le constat est pourtant là. Même de façon virtuelle, cette femme te laisse un goût amer et d'inachevé dans la bouche.
Le bruit du film commence même à t'agresser les oreilles, l'absence encore une fois de plaisir te frustre plus qu'il ne t'aide. Et alors que tu allais couper cours à ce moment censé te faire jouir et te faire profiter, voilà que la porte de ta chambre s'ouvre brusquement de façon inattendue. « BORDEL ! WILL ! » Tu sursautes complètement, fermant l'ordinateur et renfilant ton jogging plus vite encore que si tu te réveillais en plein d'une attaque. Assis sur le bord du lit, les mains croisées sur les genoux tu baisses la tête fautif, comme un gamin pris en faute alors qu'il faisait une bêtise. Bordel que c'était humiliant !
Tu relèves la tête pour le regarder de façon outrée. Et puis quoi encore, il savait se tenir un minimum, merde. « Je suis pas stupide, même si je doute qu'elle soit encore innocente sur le sujet. » Et pensez à April dans cette situation et à son copain. Non. Non, non et non. Tu avais bien assez d'image dans ta tête pour le moment. Et de honte aussi. Et puis merde, ta nièce était tout à fait au point sur le sujet si tu en jugeais par les suçons que tu as déjà vu sur sa gorge.

Tu frottes tes yeux, pourquoi c'était pas ce genre de moment que ta mémoire voulait oublier plutôt que ta fête d'anniversaire de tes quinze ans dont William et Edward t'ont déjà parlé mille fois mais que tu n'arrives pas à te souvenir ? Ha elle était belle ton amnésie, elle devrait être sous ton contrôle plutôt que d'avoir sa propre conscience. « Putain... Je suis choqué à vie. Se faire surprendre par son frère. A trente-huit ans. » Tu grimaces, occupé, c'était vite dit. Ton occupation n'avait pas donné ce que tu voulais au final et tu étais plus à fleur de peau encore que avant d'essayer de te soulager. Sensation qui t'arrivait bien trop régulièrement ces derniers mois. « Non, je le suis plus là. » Tu te lèves, toujours torse-nu pour croiser les bras sur ton torse et regarder le verre de vin dans la main de ton frère et les tâches sur le parquet.
Du vin. Bonne idée. Tu en aurais bien besoin d'un verre là maintenant pour nettoyer les images dans ta tête qui te repassent en boucle le fait que ton frère te surprenne. Ou la bouteille complète. Oui, c'était une bonne idée ça, la bouteille entière devrait faire l'affaire. « Passe la bouteille. » Tu sors en vitesse de ta chambre, voulant mettre de la distance entre ce moment de pure honte et toi, tu ne sais pas si tu seras à nouveau capable d'y entrer ou d'allumer l'ordinateur sans penser à ce moment-là.
Tu entres le premier dans le bureau, te servant un verre au passage alors que Will te suivait, silencieux. Tu ne veux même pas savoir ce qu'il lui passait par la tête. Tu ne veux même pas savoir ce qu'il peut penser de son petit-frère qui matait du porno sous son toit. Du fait que son petit-frère de trente-huit ans ait besoin de mater du porno tout cours en fait. Tu grimaces à l'idée de ce qu'il peut penser et tu prends le verre rempli au maximum avant de t'asseoir dans son fauteuil, derrière le bureau et de poser tes pieds dessus, y prenant tes aises. « Qu'est-ce que tu étais entrain de faire de beau ? Je croyais que tu étais en rendez-vous concernant les travaux aujourd'hui. » Tu bois tranquillement le vin, essayant de vraiment oublier ce qu'il s'était passé à peine plutôt, lisant de façon désintéressée un des papiers qui traînait sur son bureau et que tu venais de te saisir.

Je toquerais la prochaine fois promis. Je vous jure que je toquerais. Je n’ai pas besoin de connaître la vie sexuelle de mon petit frère. Ni celle de ma fille encore moins celle de ma fille même, mon frère encore peut faire ce qu’il veut, ma fille c’est autre chose et il ne vaut mieux pas que je pense à ce qu’elle pourrait faire avec son petit ami où à ce qu’ils ont peut-être déjà fait. Je préfère ne pas savoir. Je fais une petite moue mécontente et hoche la tête de gauche à droite, non impossible qu’elle soit déjà passé à l’acte, hors de question.

« Non, n’importe quoi, je ne vois pas pourquoi tu dis ça. »

Je fais l’autruche quand il s’agit de ma fille toujours. Je ne vois même pas qu’elle me pique de l’argent, du moins je le vois, mais je la laisse faire, sans parler des soirées qu’elle organise quand je ne suis pas là, ce qui est de plus en plus rare vu que je suis là tout le temps depuis que le journal à brulé. Je ne pensais pas surprendre un jour mon petit frère, mais au final ça me fait plutôt rire, surtout sa réaction. Je ne vois pas ce qui a de si terrible, peut-être un peu. Je n’aurais pas aimé être à sa place. Je n’aurais pas aimé du tout même, c’est surtout gênant pour la personne surprise et sa remarque me fait sourire encore plus, je me retiens rire pour ne pas le vexer. J’imagine qu’il a besoin de se détendre, il n’a pas eu des moments facile ces derniers temps alors ce n’est rien du tout qu’il mate du porno. Ça pourrait être plus grave que ça. Je surveille qu’il ne fasse pas de bêtises depuis que je l’héberge. J’essaie de faire attention à lui. J’ai cru le perdre, je ne veux pas qu’il fasse de conneries. Je hausse les épaules et fini par lui répondre :

« April n’est pas venue au monde par le pouvoir du saint esprit tu sais, elle ne serait pas là si je n’avais pas couché … donc tout va bien, je ne suis plus un gamin, t’en est plus un, il n’y a pas de malaise avec le fait de se masturber, si tu veux tout savoir ça m’arrive de le faire aussi. »

Je ne sais pas si ça va le gêner qu’on parle de cul mais après tout c’est naturel alors pourquoi en faire tout un tabou ? Il se lève et sors de la chambre je le regarde faire en hausse les sourcils et je penche la tête pour voir où il va, ans mon bureau, seigneur, je lève les yeux au ciel et le suit. Je croise les bras en le voyant se servir et s’installer comme un prince. Les pieds sur mon bureau, heureusement que mes dossiers sont dans mes tiroirs et que celui en cours n’est pas sous ses pieds, j’aurais pu l’assassiner sinon. Je soupire quand il me demande ce que je faisais là. C’est la meilleur ça, il a toujours eu le chic pour retourner les questions. Je viens près de lui et pendant que je vire ses pieds de là où ils sont a coup de hanche pour me poser contre le bureau je lui dis :

« Vire tes pieds de là, tu n’es pas chez mémé et même « mhaimeo  í »ne t’aurais pas laissé foutre tes pieds sur une table. »

Je croise les bras et repense au journal, est-ce que je dois lui parler des problèmes que je n’ai ou pas ? J’imagine qu’il aimerait être courant, mais d’un côté il a d’autres choses à penser et je n’ai pas envie de l’embêter plus. Le journal c’est mon problème, c’est mon affaire pas la sienne, j’ai toujours appris à gérer les problèmes seul depuis que Dalila est morte. Il y a encore sa photo sur mon bureau et d’autres photos de familles, lui et Edward, nous trois, les parents, bref trop de photos. Je fini par lui répondre :

« Si j’avais rendez-vous mais les travaux ne peuvent pas être lancés tant qu’on ne sait pas si c’est accidentel ou non, tant que l’enquête ne sera pas finie se sera en stand-by et il semblerait que ça prenne du temps. »

Ça me rend malade de le dire tout haut et de savoir que tout reposer sur les autorités. Ils n’ont rien fait quand elle est morte. Ils ne font jamais rien. J’envisage sérieusement de faire comme la dernière fois et de mener ma propre enquête. Je n’aurais peut-être du devenir détective privé, je suis doué pour ça, détective ou pas je suis prêt à prendre tous les risques pour retrouver le coupable s’il s’avère que ce n’est pas un accident et quelque chose me dit que ça n’en est pas un.

« Et toi alors ? Tu en es ou avec … »

Je me pince la lèvre. Je ne sais pas s’il a envie de parler de ses séances de psy ou de sa perte de mémoire. Il ne me dit rien et j’imagine qu’il a ses raisons, mais j’aurais aimé qu’il me parle. Je suis son grand frère quoi qu’il arrive, c’est à moi de m’occuper de savoir s’il va bien.

Tu hausses un sourcil. Il croit vraiment que... Tu ne cherches pas à te lancer sur le sujet, mais il devrait se rendre compte que sa fille à dix huit ans et qu'elle a son mec qui pionce dans sa chambre et tu doutes qu'ils jouent aux cartes. Bien que heureusement, tu ne les as jamais surprit ou entendu de chose suspecte venant de la chambre de la demoiselle. En même temps tu as, dès ton arrivée, posé tes bagages dans la chambre la plus éloignée des leurs, préférant être prêt de son bureau.
La frustration ne n'avoir pas pu prendre ton pied commençait à partir et même si tu ressentais toujours une certaine tension, celle-ci était bien moins forte qu'à l'accoutumée. Tu finis même par grogner et donné un coup de poing dans l'épaule de ton frère. « Appelle moi con, je sais comment on fait des gosses, et je n'ai aucun malaise avec ça. Mais que tu m'aies vu faire... Encore à quinze ou seize ans je dis pas, mais à l'âge de maintenant, c'est gênant, c'est comme si tu surprenais April entrain de se faire trin-. » Tu ne finis pas ta phrase quand tu croises les yeux meurtrier de ton frère. Tu voulais finir la journée en vie. Il y a quelques mois, mourir de ses mains ne t'aurait pas gêner, maintenant, un peu plus.
Autant lui faire oublier ce que tu allais dire en grimaçant. Tu ne voulais pas savoir ce que ton frère faisait dans sa chambre seul ou avec quelqu'un. Tu n'avais pas besoin de le savoir. Bordel, c'était ton frère, pas ton meilleur-pote. « Et j'ai pas besoin que ajoutes des images mentales en me disant que toi aussi tu le fais. Je n'ai pas besoin de connaître toute ta vie sexuelle, t'es mon frère, pas un simple pote. » Parler sexe n'a jamais été une gêne entre vous mais vous en parliez plus pour commenter un truc comme ça, ou pour déconner, jamais après avoir surpris l'autre dans son intimité.

C'est aussi pour ça que tu file dans son bureau pour boire un verre, à défaut d'avoir mieux. Tu te fais virer tes pieds de leur support, levant les yeux au ciel alors qu'ils retombent lourdement au sol pour qu'il puisse s'appuyer contre le meuble à côté de toi. « Roh ça va, je vais pas l’abîmer ton bureau. Et dans mes souvenirs ce n'était pas moi qui me prenait des roustes de mhaimeo i. » Un sourire joue sur tes lèvres. Tu étais le petit dernier, et comme on dit, le petit-dernier est souvent très gâter. Et tu n'as pas échappé à la règle, en même temps, en ayant deux grand-frères qui avaient sept et douze ans de plus que toi, c'était facile.
« Comme toujours, les joies de l'administration. Je ne comprend toujours pas comme Ed et toi vous pouvez aimer bosser le cul assit sur des chaises avec vos caractères de merde. » Caractère irlandais, merci papa. Aucun de vous trois n'avait échappé à la règle, toi encore plus qu'eux peut-être car tu n'as jamais supporté être assit derrière un bureau. Déjà à l'école c'était très difficile, tu te faisais facilement remarqué, ce n'était que sur le terrain que tu y arrivais. Même à l'armée, en faisant partit des officiers généraux, tu n'as pu te résigner à aller sur place, à participer avec tes hommes.
Tu regardes ta main qui tiens le verre de vin. C'était ce côté de ton corps qui a le plus pris pendant ton accident. Peut-être que tu aurais dû, comme tes frères, commencer à t'y mettre toi aussi à bosser derrière un bureau. Peut-être que tu n'aurais pas été cloué au sol définitivement.

Tu relèves ton regarde de ses papiers, reposant la feuille avec les autres. Son air pincé, comme s'il marchait sur des œufs ne t'était plus si difficile à supporter qu'au début. La première fois qu'il a prit des pincettes avec tout ça, tu as quand même réussit à lui balancer ton verre à la tête avant de l'insulter et de le virer de chez toi. Maintenant tu supportais cela, tu savais qu'il ne serait jamais à l'aise avec tes problèmes. « Hum ? Ho ça va. Je n'ai pas rendez-vous avant la fin du mois. » Un aller-retour à Londres par mois, ce n'était pas cher payer pour finir ta thérapie et être reconnu comme apte à vivre parmi les civiles sans péter un plomb. « Mais je suis en vie, c'est pas censé être le plus important ? » Tes yeux sont plongés dans les siens, tu sais qu'il va chercher à y lire quelque chose mais il va simplement se retrouver face à un mur de pierre. C'est une provocation. Une belle et magnifique provocation alors que tu amènes ce sujet sur la table.
Buvant encore quelques gorgées, tu savoures le goût du liquide alcoolisé coulant dans ta gorge. « Tu as vraiment toujours eut bon goût pour le choix du vin. » Comment ça tu changes de sujet après la bombe que tu as posée avec le minuteur bien en vue ? Tu finis ton verre en quelques gorgés, en resservir un deuxième te semble soudainement être une bonne idée.
Debout prêt du meuble, la bouteille en main et faisant dos à ton frère tu t'arrêtes quelques secondes. Puis tu secoues la tête avant de laisser le liquide couler à nouveau dans le verre.

J’ai un large sourire quand il me dit qu’il sait comment faire des gosses, j’espère bien pour lui ça serait tragique à son âge de ne pas savoir comment on fait les bébés. Je perds mon sourire rapidement quand il me parle de ma fille avec son petit ami. Je lève la main pour le stopper avant qu’il n’en dise plus :

« Tais-toi, ne dit rien de plus que je pourrais te faire regretter. »

Je plaisante évidement, je ne m’en prendrais jamais à mon frère, mais je sais bien menacer, mon petit air en a surpris plus d’un dans mes enquêtes et ils ont moins fait les malins quand j’ai balancé tout ce que je savais, alors je ne fais jamais de menace à la légère, mais là c’est mon frère et je ne lui ferais jamais rien, je tiens trop à lui pour ça. Je lève les yeux au ciel de nouveau, il est un peu susceptible quand même le frangin même si je suis d’accord sur le fait que les images mentales ce n’est pas vraiment l’idéal ça peut bloquer plus qu’autre chose, mais un sexe reste un sexe quoi qu’on en dise.

« Oh ça va, une queue c’est une queue, on a de la chance dans la famille on est bien loti, mais je suis d’accord je n’ai pas envie d’avoir des images mentales de toi entrain de … «

Je fais une grimace pour bien lui montrer que ça me donne plutôt envie de vomir de l’imaginer. Je ne sais pas vraiment s’il l’a vu parce qu’il est parti vers le bureau et que je l’ai suivi. Il s’est installé comme un prince sur MON bureau. Je lui fais un doigt d’honneur quand il me dit que ce n’était pas lui qui se prenait des roustes, oui je suis très mature pour mon âge, mais c’est mon frère, on a toujours été plus ou moins comme ça tous les deux.

« Tu n’étais pas en reste non plus, mais c’est vrai qu’avec Ed on lui en fait voir de toutes les couleurs. »

Ça me manque parfois. J’aimerai redevenir un gosse et ne pas avoir tous ces soucis en tête, mais on ne remonte pas le passé, sinon je changerai plusieurs choses à commencer par la mort de ma femme, je lui dirai de ne pas partir, de ne pas prendre ce taxi. Je la ferais revenir si je pouvais, mais c’est impossible je le sais. Je fronce les sourcils et le regarde comme s’il venait de me dire une insulte. Je n’aime pas qu’on me dise que je reste le cul sur ma chaise de bureau. S’il savait à quel point ce n’est pas mon métier. Je croise les bras, vexé et lui réponds :

« Je ne reste pas assis sur ma chaise tu sais. J’enquête, je bouge, je vais voir les gens, je fais de la radio aussi et j’ai fais le tour du monde je te rappelle alors non je ne suis pas le cul sur une chaise, pourquoi crois-tu que mon journal a été cramé ? Je ne voyage plus depuis la mort de Dalila … »

Je ne lui parle pas beaucoup de ça, il a d’autres soucis en tête et honnêtement je crois qu’il n’est pas plus prêt à me parler de ce qu’il lui est arrivé. Il est en vie, oui heureusement, je n’aurais pas supporter de le perdre. Je n’aurais pas aimé qu’il parte avant moi. C’est les ainés qui doivent partir avant, pas l’inverse, tout comme les parents sont censé partir avant les enfants, mais on ne choisi pas quand on part.

« Ok … »

Je n’ai pas envie de l’embêter plus. Il me parlera quand il en aura envie et ce n’est visiblement pas aujourd’hui qu’il le fera. Il change d’ailleurs de sujet et me dit que j’ai bon goût pour le vin.

« C’est l’avantage d’avoir eu une femme experte en vin. »

C’est Dalila qui m’a fait découvrir le vin. Elle avait été en France plus jeune, on y est retourné beaucoup pour les vacances. J’ai encore beaucoup de bouteilles dans ma cave que je n’ai même pas ouverte et je lui dis :

« J’ai des tas de bouteilles à la cave … autant que ça sert un peu. On les servait surtout pour les grandes occasions … »

Je les sors beaucoup moins maintenant, même si ça ne m’empêcher pas de boire un verre de temps en temps comme maintenant.

Tu lèves les mains en signe de paix, tu n'es pas prêt à perdre ta vie pour avoir parlé de ta nièce de cette façon. Oui, tu as fait la guerre, ou tu as mis ta vie en jeu pour ton pays. Mais faire cet honneur à cette petite peste ? Jamais. Il y avait des limites, même dans une famille... Ok, tu avoues, tu blagues, tu donnerais ta vie pour les tiens. Peut-être pas en fait. Tout dépendait du jour, de ton humeur. Et aujourd'hui.. Ouais, non, tu n'avais pas envie d'être si gentil avec la fille de ton frère.
Tu hausses un sourcil, fier de toi quand il fini quand même par avouer qu'il ne voulait pas t'imaginer en pleine action avec une nana ou un type. Enfin, avec une nana. Oui, une nana. Même s'il a rien dit. « Ha tu vois ! » Mais tu chasses cette pensée en filant vers son bureau, n'hésitant pas à hausser la voix quand tu es dans le couloir et lui dans ton dos. « Et fais pas genre, je sais que tu as grimacé. » Tu ne peux pas le voir faire mais tu sais qu'il l'a fait. Tu le connais, c'est ton frère. Tu sais quelles peuvent être ses réactions.
Bien installé dans son bureau, loin de la scène de crime, tu hausses les yeux au ciel. William sait que tu as des difficultés à t'expliquer, il n'était pas obligé de partir au quart de tour à chaque fois que son travail était abordé d'une manière qui ne lui plaisait pas. Et Dieu sait combien de fois il s'est énervé à ce propos. Même lorsque tu t'étais allié à Edward pour se moquer gentiment. « Ce n'est pas ce que je voulais dire tu le sais. Simplement, je ne comprend pas comment un homme avec ton caractère est encore capable de travailler avec ce genre de... De... » Un trou. Tu as un putain de trou alors que tu étais bien lancé dans ta phrase. Tu serres les dents à en les faire grincer, tes jointures devenant blanches sur les accoudoirs du fauteuil que tu n'avais même pas sentit que tu serrais. « Bref. Je voulais pas dire ça. » Ajoutes-tu d'une voix plus faible avant de vouloir un autre verre et pour pouvoir changer de sujet. Ton incapacité à t'exprimer ayant coupée toute envie à vouloir t'expliquer sur ce que tu voulais dire à l'origine.

Tu ris doucement en te retournant, prenant appuis contre le meuble et sirotant ce nouveau verre avec encore plus d'attention que le précédent. Pour toi, le vin était compliqué à choisir, tu n'étais pas né avec ce don. Et puis, tes longs mois loin d'ici t'avaient appris à te contenter du peu que tu avais. Même si actuellement tu savais reconnaître ce qui était bon ou non. « Je dirais bien qu'avoir eu une belle-sœur comme elle à pu développer mes papilles mais je crois que je resterais à jamais friand d'un bon whisky de chez nous. » Les alcools fort ont toujours eut ta préférence. Parce que parfois c'était plus simple de se noyer dedans pour oublier le son des balles, pour oublier que vous étiez un de moins dans le groupe du retour au bercail, pour oublier les yeux vides de ceux que tu avais tué. « Mais si tu as besoin d'aide pour les vider, tu sais que je suis là. » Car un alcool restait un alcool et aujourd'hui, tu aimerais bien oublier que ton frère est entré dans ta chambre et qu'il t'ait vu te branler devant un porno. Enfin, tu tentais de le faire. Mais là n'était pas le sujet.

Tu humectes tes lèvres, il y a autre chose qui fait que tu sois frustré et sur les nerfs aujourd'hui. Que tu ne sois pas comme d'habitude. Ce qui t'avait un peu poussé à justement regardé ce fameux porno pour occuper ta tête à un autre problème que celui auquel tu as été confronté ce matin. « Et en parlant de vider... » Aborder le sujet dont tu veux parler est plutôt compliqué car très important pour toi. Mais en même temps, incompréhensible pour les autres. Parce qu'ils n'ont pas vécu comme tu l'as fait. Il n'ont pas connu ce que tu as connu. Vivre avec la possibilité que chaque jour soit le dernier, qu'il n'y ait qu'une seule chose à laquelle on est à se rattacher pour se redresser et continuer. « J'ai eut un appel plus tôt dans la journée. Ils ont enfin fait rapi... Ratapr... » La foule d'émotion qui t'assaille depuis se matin te reviens en pleine face au point d'en perdre à nouveau tes mots. Tu sentais aussi les larmes monter dans tes yeux, c'était rare, ce n'était pas courant, mais c'était tout de même là. La douleur. Mais tu dois insister pour qu'il comprenne et ne pas finir ta phrase ainsi. Alors tu te forces à prononcer des mots si douloureux dans ta bouche. « Gipsy est rentré à la maison. » Tu reprends ta phrase en chuchotant et tu n'es même pas sûr que ton frère t'ai entendu.

Gipsy. Ton avion. Ton bébé. L'être de métal qui partageait réellement ta vie. La moitié de toi, celle qui te permettait de t'envoler toujours plus haut, toujours plus loin et qui comme toi, se retrouvait cloué au sol définitivement.
Un pilote était assigné à un appareil, bien qu'ils soient tous les même, c'est comme une voiture ou même un vélo, chaque engin à ses petites particularités qui faisaient que pilote et avion partageaient un bout de chemin ensemble, quelques années, une moyenne de cinq ans. Et rare étaient les pilotes qui possédaient le même appareil encore plus longtemps, mais toi, tu faisais partit d'eux. La première fois que tu es monté à son bord pour le piloter, tu n'avais que vingt-six ans et tu as su le jour là que jamais tu ne t'en séparerait, que Gipsy et toi ce serait à vie, que vous ne feriez jamais votre chemin l'un sans l'autre. Ce qui est effectivement le cas, puisque vos deux carrière dans la Royal Air Force se sont arrêtée en même temps. Au bout de dix années.

Tu desserres tes doigts qui s’agrippaient au meuble contre lequel tu étais toujours appuyé. Tu n'avais même pas remarqué que tu t'y accrochais comme si ta vie en dépendait. Évitant toujours le regard clair et perçant de ton frère, tu masses doucement ton poignet parcouru par cette longue balafre psychologiquement douloureuse. « Est-ce que tu peux m’emmener le voir ? » Tu ne sais pas si William va accepter, tu l'espères un peu d'ailleurs. Pas que aller à la caserne soit compliqué, car même si tu ne conduis pas, tu connais très bien la ligne de bus qui t’amènerais à la capitale puis celui à prendre pour te rendre sur la base plus loin de la ville.
Le problème, c'est que tu ne sais pas encore si tu es capable d'aller seul là-bas, pour voir ton avion. Ou plutôt ce qu'il en reste.

J’admet que ce n’est pas franchement génial d’imagine son frangin entrain de se tripotter. Ce ne l’est pas plus qu’il y a quinze ans. Non définitivement pas. Je capitule donc pour cette fois et je souris quand il me dit qu’il sait que j’ai fait une grimace. Fichtre, il me connaît trop bien. Je lève les yeux au ciel et lui réponds :

« Ce n’est pas vrai, je n’ai pas grimacé. »

J’ai parfois un âge mental de cinq ans, surtout quand je suis avec mes frères. Ça me donne l’impression d’être redevenu un gosse et c’était tellement mieux quand on l’était, on n’avait pas tout ces soucis, on se préoccupait juste de savoir qui était le préféré des parents ou à qu’elle fille on plairait. Finalement c’était plus simple.

On se retrouve dans le bureau et je lui fais enlever ses pieds. Il y avait un moment qu’on ne s’était pas chamailler de cette façon. J’ai toujours été un peu chiant sur les bords avec certains principes et même si ce n’était pas lui qui se faisait le plus souvent botter les fesses, j’ai changé depuis et je suis encore plus chiant qu’avant, surtout sur certaines choses et encore plus quand on parle travail et que ça me titille comme maintenant quand il me dit que j’ai le cul sur une chaise. Je ne suis pas du tout d’accord avec ça et je lui fais savoir, jusqu’à ce qu’il beug littéralement. J’allais lui exposer le pourquoi du comment je ne suis pas comme tous les autres administratifs, mais il perd ses mots et je dois dire que ça m’inquiète. Ça doit être la première fois depuis qu’il est là que je l’entends beuguer et ça me fait tout drôle. Je ne m’y attendais pas vraiment, même si je savais que ça pouvait arriver et je n’ai pas envie qu’il voie que ça me trouble. Je fini par hausser les épaules et lui réponds :

« Ce n’est rien. »

Qu’est-ce que je peux dire d’autre ? Plaisanter ? Je crois que ça serait mal venu, c’est encore trop tôt pour plaisanter. Je suris à sa remarque et repense à Dalila. Elle aimait bien mes deux frères et elle était toujours accueillante avec eux, ça me fait un grand vide de ne plus la voir débarquer sans arrêt dans on bureau pour me dire que j’avais oublié de rapporter des courses ou pour me demander si j’avais lancé une machine, si je lui avais pris sa robe au pressing, si je voulais qu’on fasse l’amour, c’est sans doute ça qui me manque le plus tous les moments où on s’envoyait en l’air. Elle avait le chic pour débarquer pile dans les moments où j’en avais envie le plus, comme si elle s’en doutait. On était connecté. Penser à Dalila me fait toujours autant mal, surtout depuis que je sais que c’est moi le responsable, indirectement, je ne l’ai dit à personne et je me culpabilise tout seul comme un grand. Je chasse mes pensées et je souris à Gab avant de lui répondre :

« Ouai je sais, on n’a qu’à faire un dîner pour ton retour si tu veux, invite qui tu veux … »

Je ne sais pas si c’est une bonne idée, mais je lui propose quand même. Il a peut-être envie de passer une soirée avec quelques amis … je ne sais pas s’il en a encore ou s’ils sont tous militaire ou non, en fait je me rends compte que je ne connais pas grand-chose de la vie de mon frère. Je vais devoir me rattraper. Je fronce les sourcils quand il me dit qu’il a eu un appel dans la journée et que Gipsy a été rapatrié, du moins il essaie de le dire. Je le regarde mettant d’abord un tant avant de comprendre ce qu’est Gispy et avant de me rappeler que c’est le nom de son avion. Son avion qui doit être dans un sale état, sans doute dans un pire état que lui. Je sais que c’est étape importante pour lui. Une étape par laquelle je suis passé quand le taxi de Dalila a été retrouvé morte. J’ai voulu voir la carcasse du taxi et j’ai pu imaginer combien l’accident à du être violent. J’ai eu des images dans ma tête, ce n’était pas une très bonne idée, mais lui c’est différent, parce qu’il l’a vécu. Je décroise les bras et fini par lui dire :
« Ouai si tu veux. Si tu te sens prêt à y aller et … au fait … si je peux faire quoi que ce soit … »
Il sait très bien que je peux l’aider, que je suis là et que je n’ai pas l’intention de le laisser tomber. Je serais là quoi qu’il arrive. C’est mon petit frère.